Entretien avec Jasmijn de Visser
Chassé Theater, Breda, Pays-Bas
A travers une série d’entretiens avec les exploitants membres de son comité de validation, Europa Cinemas réalise un état des lieux de l’exploitation indépendante en Europe en ces temps de crise.
1 - Tout d’abord, comment allez-vous ?
Merci de demander ! Je vais bien ! Je me sens chanceuse que tous mes amis et ma famille soient en bonne santé. J’essaie de ne pas me plaindre, mais parfois je suis bougonne parce que les moments avec mes proches et la fête me manquent. Cela me donne tellement d’énergie dans la vie normale.
2 - Comment gérez-vous cette situation particulière d’un point de vue professionnel ? Actuellement, pouvez-vous travailler, vous-même et vos collègues, ou avez-vous dû cesser votre activité ?
Je travaille dans un des plus importants cinémas des Pays-Bas avec plus de 2500 sièges répartis sur 4 salles. La plupart de mes 120 collègues sont à la maison, il y a une dizaine de personnes par jour sur place pour les tâches qui le demandent. Je suis ravie de pouvoir continuer à travailler au cinéma au lieu de rester à la maison. Le moral du groupe est fantastique ! Nous sommes tous séparés, mais plus unis que jamais ! Nous n’avons pas de recettes mais heureusement nous sommes soutenus au niveau local.
3 - Quels projets vous ont paru intéressants pour maintenir une activité et lesquels avez-vous pu mettre en place ?
Nous n’avons mis en place aucun nouveau projet mais nous partageons un programme, « Chassé à la maison », avec lequel nous diffusons gratuitement des films et des pièces de théâtre. C’est un très bon moyen de poursuivre une activité artistique même si je préfèrerais accueillir notre public dans nos salles.
4 - Pensez-vous que de nouvelles manières de faire vont se mettre en place pour votre activité et celles de vos confrères ?
C’est compliqué de prévoir l’avenir, certains disent que ça ne sera jamais plus comme avant, mais je suis une personne très optimiste donc je pense que tout finira par rentrer dans l’ordre. Mais pas cette année j’en ai peur…. En prenant en compte l’écart de sécurité de 1,5 mètre, la capacité de notre cinéma chute de plus de 30%.
5 - Quelle est, aux Pays-Bas, la réponse de l’Etat et des institutions publiques locales en faveur des salles de cinéma ? Des soutiens financiers existent-ils ou sont-ils en train d’être étudiés ?
Il y a de nombreuses initiatives, plus ou moins importantes. Notre gouvernement a mis en place un énorme programme pour aider les entrepreneurs, les auto-entrepreneurs ainsi que différents programmes de soutien pour chaque secteur. C’est fantastique de voir la vitesse avec laquelle toutes ces actions décisives se mettent en place. Nous avons notre propre fondation caritative, et un donneur anonyme vient de nous verser 75 000€ pour soutenir les petites affaires locales dans le domaine de l’art. La semaine prochaine, nous allons commencer à reverser cet argent à ceux qui en ont le plus besoin. Ces temps de crise voient apparaitre les meilleures choses, nous nous soutenons les uns les autres.
6. Dans votre rapport aux spectateurs, avez-vous des craintes ou au contraire voyez-vous des raisons d’être optimiste ? Comment voyez-vous évoluer les liens avec votre public ?
Je pourrais difficilement me prononcer. J’ai entendu ce témoignage poignant d’un web designer à la radio : ces temps ne sont pas pour la conversion mais pour la conversation. Donc nous nous efforçons de renforcer la relation avec notre public, et les médias sociaux nous sont d’une grande aide pour cela.
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Adrian Preda, Antoine Bernard
Avril 2020
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